La première bataille de Fleurus

Jean Godet

La première bataille de Fleurus (trois autres se dérouleront encore sur son territoire en 1690, 1794 et 1815) eut lieu le 29 août 1622, un lundi. Cette bataille est un épisode de la guerre dite de Trente ans qui débuta en 1618 et ne finit, en effet, qu’en 1648.

A la fois religieuse et politique, la guerre de Trente ans fut provoquée par l’antagonisme qui régnait entre les Protestants et les Catholiques et par la crainte qu’inspirait aux autres souverains de’ l’Europe les visées ambitieuses de l’empereur d’Allemagne, Frédéric II. La lutte commença en Bohême par la défenestration de Prague. L’empereur ayant ordonné la démolition des temples luthériens, une troupe de , Protestants envahit le palais du Hradschin, à Prague, et du haut des fenêtres, précipita dans le vide les lieutenants de Sa Majesté Impériale. Ceux‑ci tombèrent heureusement sur un tas d’ordures et purent d’ailleurs se sauver.

La guerre de Trente ans se divise en quatre périodes. Pendant la première, la période palatine (1618‑1624), l’électeur palatin Frédéric V, chef de l’Union protestante, fut proclamé roi de Bohême mais vaincu par les Impériaux en 1620, à la bataille de la Montagne blanche, près de Prague, il perdit ses états. La journée de Fleurus de 1622 appartient donc à la période palatine. Au cours de la deuxième période ou période danoise (1624‑1629), le roi de Danemark Christian IV prit la tête des troupes luthériennes mais battu par Wallenstein et Tilly, il dut signer la paix à Lubeck. Au cours de la troisième période ou période suédoise (1630‑1635) le roi de Suède Gustave‑Adolphe, homme de guerre remarquable, remporta les victoires de Breitenfeld et du Lech mais fut tué à Lützen le 16 novembre 1632. Enfin, la quatrième période ou période française (1635‑1648) fut marquée par la victoire de Fribourg remportée en 1644 par le Grand Condé sur les Impériaux et, en 1646, par celle de Nordlingen gagnée par Turenne et Condé.

La première bataille de Fleurus mit aux prises les troupes espagnoles de la Ligue catholique comman­dées par le mestre de camp général don Gonzalès de Cordova et celles réunies de l’Union protestante placées sous les ordres de deux célèbres aventuriers,

Ernest de Mansfeldt et l’évêque Christian von Halberstadt. Certains historiens, soit dit en passant, situent cette bataille le 30, ou même le 4 août, mais il est certain qu’elle eut bien lieu le 29.

Christian von Halberstadt et Ernest de Mansfeldt, dont nous allons d’abord voir les faits et gestes avant la bataille de Fleurus, ne furent pas, et de loin s’en faut, des personnages ordinaires. Fils naturel du comte Pierre Ernest de Mansfeldt, qui appartenait à l’une des plus illustres familles de l’Allemagne, Ernest de Mansfeldt, d’ailleurs légitimé par l’empereur germanique Rodolphe II, fut un redoutable condottière qui marqua de sa terrible empreinte la guerre de Trente ans. Pour certains historiens, les plus nombreux, Mansfeldt serait né à Malines en 1585 et sa mère aurait été une dame de cette ville. Pour les autres, il vit le jour dès l’an 1580 et ce serait Anna de Bentserath, une belle Hollandaise, qui l’aurait mis au monde. Le bâtard légitimé, dont la figure, à cause d’un bec‑de‑lièvre, était, paraît‑il, « d’une rare laideur », eut pour parrain l’archiduc Ernest d’Autriche, gouverneur des Pays‑Bas espagnols, qui surveilla d’ailleurs sa première éducation. D’abord page de son père, c’est sous l’égide de son frère Charles de Mansfeldt que le futur condottière s’en alla apprendre le métier des armes en Hongrie. Ayant obtenu de l’archiduc Albert, le mari de l’infante Isabelle, le commandement d’un régiment, il prit part, dans les rangs espagnols, au fameux siège d’Ostende qui débuta en 1601 et se prolongea jusqu’en 1604.

Furieux de ne, pas avoir reçu d’avancement, Mansfeldt passa au service de l’archiduc Léopold d’Autriche. En 1610, le comte de Salm le fit prisonnier. Ayant recouvré la liberté, il se brouilla avec Léopold et alla jusqu’à l’insulter. Entré dans l’armée du duc de Savoie Charles Emmanuel, qui le créa marquis de Castel‑Nuovo et de Butiglieria, il combattit les Espagnols. Avec 2.000 hommes, il s’en fut ensuite en Bohême pour se joindre aux insurgés qui voulaient secouer le joug de l’empereur Ferdinand II. Dans l’intention de se faire bien voir des révoltés, le bâtard légitimé abjura la religion catholique dans dans laquelle il avait été élevé et embrassa le protestantisme. Les insurgés en firent d’ailleurs leur général en chef. Mansfeldt contraignit le comte de Bucquoi, qui commandait les Impériaux, à abandonner le pays. En 1619, il fut mis au banc de l’Empire mais notre condottiere, qui n’en avait cure, fit la guerre, apparemment pour le compte de l’électeur palatin Frédéric V, mais en réalité pour son propre compte.

A la tête de bandes indisciplinées composées plutôt de dangereux aventuriers, de bandits, de pillards que de véritables soldats dignes de ce nom, il s’en alla combattre dans le Haut-Palatinat, puis sur le Rhin et triompha du comte de Tilly et de Gonzalès de Cordova. Cependant, en 1621, il dut battre en retraite sur le Bas-Palatinat et s’en fut ravager l’Alsace. « Sa tête ayant été mise à prix en Allemagne », dit la Biographie Michaud, il se réunit à Christian von Halberstadt.

Christian, duc de Brunswick-Lunebourg, évêque luthérien d’Halberstadt, naquit le 10 septembre 1599. Il allait se rendre célèbre pendant la guerre de Trente ans, non seulement par son extraordinaire courage et son intrépidité, mais aussi par ses nombreuses rapines et brigandages. Frère cadet du duc régnant Frédéric Ulrich de Brunswick-Wolfenbuttel, Christian fut élevé à la cour de Danemark. Il apprit le métier des armes en Hollande où il reçut le commandement d’une compagnie de dragons. A la mort de son frère Rodolphe, évêque luthérien d’Halberstadt, Christian, qui n’avait alors que 17 ans fut élu à son tour évêque d’Halberstadt.

On s’étonnera sans doute qu’un évêque devint un redoutable chef de guerre mais n’oublions pas qu’il s’agit d’un évêque luthérien. « Les fonctions des évêques luthériens, écrit le comte de Villermont qui nous a fourni les détails biographiques qui précèdent sur la vie de Christian von Halberstadt, consistaient simplement à dépenser les revenus de leurs évêchés sans autre devoir à remplir ». Dès lors, n’ayant pas charge d’âmes, Christian allait faire la guerre par goût, par esprit d’aventure et pour assouvir ses mauvais penchants.

Von Halberstadt marqua un vif attachement à la cause de l’électeur palatin Frédéric V, élu roi de Bohême et le soutint contre les Impériaux. Lorsque ce prince eut prit la fuite après la bataille de Prague, Christian se saisit d’un gant appartenant à la femme de Frédéric, le fixa à sa coiffure et jura qu’il ne l’enlèverait pas avant d’avoir rétabli l’électeur sur son trône. Il réunit ensuite une armée en Saxe et en Wesphalie, ravagea la Hesse, s’empara de plusieurs villes et pilla les églises. A Paderborn, dit la Biographie Michaud, il enleva la statue en or massif de Saint-Lidoire. Avec le métal précieux provenant de ses pillages, il fit frapper des écus portant cette devise « Ami de Dieu, ennemi des prêtres ». L’évêque d’Halberstadt ne pouvait d’ailleurs souffrir de voir un prêtre catholique sans lui faire subir les plus mauvais traitements. Cet Attila au petit pied, comme l’appelle le comte de Villermont, dépassa, dit-il, Mansfeldt lui-même en brigandages et en cruautés.

Après avoir ravagé la Hesse où il avait fait un butin considérable, Christian entra dans le diocèse de Mavence et y continua ses dévastations. Vaincu par les Impériaux au passage du Main, il parvint, malgré sa défaite à réunir un corps de 13.000 hommes. Il se joignit alors à Ernest de Mansfeldt et entra avec lui en Alsace. Le pillage, le meurtre et l’incendie y marquèrent leur passage. Parmi les troupes de Mansfeldt, écrit le comte de Villermont, « il y avait des maîtres incendiaires en titre particulièrement habiles à mettre le feu aux villes et aux villages ». Envahie, elle aussi, par les deux compères – Mansfeldt et Halberstadt – la Lorraine n’eut pas meilleur sort.

Le duc de Nevers, gouverneur de la Champagne, vers laquelle ils faisaient mine de s’avancer, s’entendit avec les Espagnols pour leur barrer la route par un mouvement enveloppant. Ayant deviné la ruse, Christian et Mansfeldt entraînèrent, à marche forcée, leurs troupes vers les Pays‑Bas espagnols.

Pour les empêcher de passer, relate J. Kaisin, 4.000 paysans rassemblés dans l’Entre‑Sambre‑et‑Meuse « rompirent » les routes conduisant vers la France et 6.000 à 7.000 autres campagnards, ceux‑ci du Brabant, furent envoyés à Pont‑de‑Loup pour interdire le passage de la Sambre. Ils y demeurèrent 7 jours et ravagèrent tout le pays. « Ils allèrent, écrit encore le même auteur, jusqu’à couper les récoltes sur les campagnes et les battre dans les granges sans que les habitants eussent osé les en empêcher ».

Les troupes de Mansfeldt et d’Halberstadt semblaient démoralisées et l’on se flattait, chez les Espagnols, de pouvoir bientôt les détruire. Cependant, les cavaliers ennemis prennent les piétons en croupe, franchissent la Meuse à Mézières et la Sambre à gué dans la région de Maubeuge. Le 27 août 1622, l’évêque luthérien et Mansfeldt couchent à l’abbaye de Bonne‑Espérance. Le 28, ils passent à Binche d’où, du haut des remparts, on leur tire des coups de feu. Mansfeldt et Christian, dit le comte de Villermont, se payent pourtant le luxe d’aller visiter le château de Mariemont qui appartient à l’infante Isabelle, fille de Philippe II et qui gouverne les PaysBas espagnols. Le dimanche 28 août, les deux aventuriers poursuivent leur marche en empruntant la chaussée Brunehaut. Ils ont l’intention, par la Campine, de se rendre à Berg‑op‑Zoom, en Hollande.

Arrivés dans la plaine de Fleurus, dit le chanoine Theys, ils campent à Wagnelée vers les 6 heures du soir. Informé de la marche de l’ennemi, don Gonzalès de Cordova, dont les troupes occupent le Luxembourg, se hâte, lui aussi, de prendre le chemin des Pays‑Bas espagnols. Le 27 il franchit la Meuse à Givet où, pour progresser plus vite, il laisse la plus grande partie de ses bagages et sa grosse artillerie. Le soir même, avec sa cavalerie, il est à Pont‑de‑Loup. Le lendemain, par le chemin dit des Lorrains, son infanterie le re . oint. Le 28 août, écrit le comte de Villermont, il nvoie l’un de ses officiers, Philippe de Sylva, « pousser de fortes reconnaissances dans la direction de Binche avec ordre d’obliger les paysans à prendre les armes et à harceler l’ennemi ». Au moment où Gonzalès de Cordova fait avancer son infanterie, il apprend que les troupes ennemies marchent sur Fleurus et part immédiatement pour leur interdire le passage. Philippe de Sylva, qui a connaissance des mouvements de l’ennemi et prévoit une bataille, ramène aussitôt sa cavalerie vers le gros des forces de Cordova. Laissant à deux de ses officiers, Diego de Ibarra et Guillaume Verdugo, la mission de hâter la progression de son infanterie, don Gonzalès, avec toute sa cavalerie, va sur le champ « prendre position au nord de Fleurus, dans la direction de Chassart, sur une éminence de Saint‑Amand, écrit le chanoine Theys, ayant le dos appuyé sur Fleurus et faisant face à la chaussée romaine ».

Vers les 5 heures et demie du soir, don Gonzalès est rejoint par son infanterie. Sur le champ, malgré une pluie d’orage torrentielle, il la fait ranger en bataille et divise, son armée en 4 corps de troupes. Le comte de Villermont nous donne la composition de ces troupes. Composé pour la plus grande partie d’Espagnols, de Bourguignons et de Wallons et placé à l’aile droite, le premier corps se trouve sous les ordres de Diégo d’Ibarra et de Guillaume de Vertugo. Formant corps de bataille, le deuxième corps comprend le régiment d’Isenbourg, la compagnie d’Emden et 4 compagnies franches. Le troisième corps est commandé par le marquis de Campolataro. A lui seul le régiment du comte Otto‑Henri Frugger compose tout le quatrième corps ; le lieutenant‑colonel Camargo se trouve à sa tête.

A peine l’armée de Cordova a‑t‑elle terminé ses dispositions de combat que l’ennemi apparaît dans le lointain. Stupéfaits, quant à eux, d’apercevoir les troupes de don Gonzalès prêtes à leur disputer le passage, Halberstadt et Mansfeldt font faire halte à leurs bandes d’aventuriers puis, écrit le comte de Villermont, « firent mine de vouloir forcer le passage par la droite des Espagnols mais, en fait, n’entreprennent rien de sérieux ».

Les forces respectives qui le lendemain 29 août vont se heurter à Fleurus, comprennent du côté des Luthériens 60 escadrons, soit 6.000 cavaliers, et 7.000 à 8.000 hommes de pied, du côté des Espagnols de la ligue catholique 8.000 fantassins et 2.000 cavaliers. Chez les deux partis, l’artillerie est plutôt maigre ; elle ne comprend que quelques canons et les Espagnols n’en n’ont que deux de plus que les Luthériens. L’obscurité venue, dans le but de tromper l’adversaire sur leurs forces réelles, Mansfeldt et Halberstadt, dit le comte de Villermont, font allumer de grands feux de tous côtés et, à plusieurs reprises, battre le tambour dans la nuit. Le lundi 29 août, à l’aube, les Espagnols aperçoivent sur leur gauche, près de Fleurus, un gros de cavaliers qui tentent de les déborder « et qui déjà, écrit le chanoine Theys, avaient pénétré en ville pour exercer leur oeuvre de pillage et d’incendie ».

Don Gonzalès fait renforcer hâtivement l’aile de son armée menacée par l’ennemi et tirer, sur celui‑ci, quelques coups de canon. Supérieure en nombre à celle de Cordova, la cavalerie de l’évêque luthérien charge avec furie les cavaliers espagnols, se jette sur les bagages de l’adversaire qu’elle entreprend de piller, s’empare du carosse du comte d’Isenbourg, du trésor de guerre de don Gonzalès et des papiers de celui‑ci. A ce moment apparaît le colonel Gaucher « qui bien que fort incommodé d’un bras, était arrivé la veille à francs étriers, du fond du Luxembourg ». Gaucher, qui, tient absolument à participer à la bataille qu’il considère d’ailleurs comme une fête, rallie la cavalerie espagnole, tombe comme la foudre sur les cavaliers d’Halberstadt et les repousse « l’épée dans les reins ». Au cours de la bataille, la cavalerie de l’Union protestante chargera six fois l’infanterie espagnole sans parvenir à l’entamer. Beaucoup de cavaliers ennemis seront tués ou blessés par les piques des fantassins de la Ligue catholique, véritable rempart d’acier sur lequel viendra se briser l’ennemi. Voilà ce qu’il advenait si l’on se frottait à la fameuse infanterie espagnole, à ses redoutables tercios lesquels ne perdront leur suprématie sur les fantassins des autres nations que le 19 mai 1643 lorsque le Grand Condé les aura vaincus à Rocroi.

Mansfeldt, de son côté, s’est porté avec ses troupes à l’attaque du centre des Espagnols. S’ensuit une terrible mêlée où, après avoir tiré, les soldats des deux partis se cassent le pistolet sur la tête.

Il s’en faut de peu que les troupes de Mansfeldt et d’Halberstadt ne soient totalement écrasées mais les Espagnols donnent des signes de fatigue. A ce moment, la victoire semble indécise. L’espoir d’infliger une défaite complète à l’ennemi n’abandonne cependant pas Cordova, écrit le comte de Villermont, « car il comptait voir apparaître d’un instant à l’autre une troupe de quelques milliers de paysans » mais ceux‑ci, qui, dit le même auteur, ont été réquisitionnés par le comte de Solre, grand bailli de Hainaut, et sont commandés par lui, n’arriveront pas sur le champ de bataille ; par suite d’informations inexactes, le comte de Solre les a dirigés sur Mons.

Avec rage, les deux partis luttent déjà depuis cinq heures d’horloge et l’on ne voit pas encore de quel côté penchera la balance de la victoire. Enfin, vers les onze heures, Halberstadt et Mansfeldt rassemblent toutes leurs forces et avec elles, dans un sursaut désespéré d’énergie, parviennent à faire une trouée dans l’extrême droite espagnole et prennent la fuite. Cordova est donc victorieux puisqu’il reste maître du champ de bataille. La journée coûte aux vaincus 3.000 hommes, tués, blessés ou prisonniers. Dix‑huit étendards restent aux mains des Espagnols. Ceux‑ci, de leur côté, ont eu 300 tués et 900 blessés.

Fleurus, où quelques mousquetaires s’étaient retranchés’ fut, écrit le chanoine Theys, « presque entièrement incendiée. Les caves, ajoute‑t‑il, servirent d’abris aux sinistrés ».

Ses troupes étant très fatiguées par les marches forcées qu’elles avaient faites avant la bataille et par l’ardeur témoignée au cours de celle‑ci, don Gonzalès de Cordova ne put songer à poursuivre l’ennemi. Il laissa donc souffler ses soldats jusqu’à trois heures et demie, après quoi les vainqueurs se mirent en mouvement. A la tombée de la nuit, les Espagnols arrivaient devant Gembloux où ils firent halte. Le lendemain, le colonel Gaucher, à la tête d’une troupe de cuirassiers rejoignit l’infanterie ennemie restée en arrière et la tailla en pièces. Gaucher fit d’ailleurs beaucoup de prisonniers et prit deux canons et de nombreux chariots à bagages à l’ennemi. Le reste des fuyards, non sans perdre encore en cours de route quelques centaines d’hommes, s’en fut se réfugier en Hollande.

Au total, durant la bataille (nous en avons cité le chiffre plus haut) et durant leur fuite, Mansfeldt et Halberstadt avaient perdu 11.000 hommes. Leur artillerie et leurs bagages étaient restés au pouvoir des vainqueurs. Parmi les i étendards tombés aux mains des Espagnols se trouvait celui d’Halberstadt qui, écrit le chanoine Theys, « était de brocard cramoisi avec la devise « pour la Liberté ». Le même auteur ajoute que ce trophée fut‑porté à Bruxelles où il s’en alla orner la chapelle du Saint‑Sacrement des Miracles.

Parmi les morts de Fleurus figuraient don Francisco d’Ibarra, mestre de camp de la cavalerie espagnole, le vicomte d’Emery ; le seigneur d’Ivoy et une quinzaine de capitaines de diverses nations. Furent blessés, les comtes de Lenehem et d’Hannapes, ce dernier atteint d’une balle de mousquet au visage, le sieur d’Henricourt qui eut les deux bras brisés, don Gabriel de Cordova, messire François du Chastel, vicomte d’Amerin et capitaine de cent cuirassiers. Les cadavres, dit le comte de Villermont gisaient « sur un si long parcours » que l’on fut obligé de faucher les blés pour les découvrir. Réquisitionnés

par le comte de Solre, ajoute le même auteur, des paysans brabançons furent chargés d’enterrer les morts.

On a prétendu que le prince Frédéric de SaxeWeimar avait participé à la bataille de Fleurus aux côtés de Christian von Halberstadt et qu’il aurait même commandé une partie des troupes de l’Evêque mais cette assertion ne semble pas prouvée.

Ayant appris qu’il y avait eu bataille à Fleurus, l’Infante Isabelle ordonna aussitôt que l’on prit soin des blessés sans tenir compte du parti auquel ils appartenaient. Elle alla voir ces malheureux et leur fit donner des vivres, du vin et même de l’argent. Les dames de Bruxelles se dévouèrent également pour adoucir le sort des blessés de Fleurus. Le 4 septembre, l’Infante Isabelle passa en revue, à Malines, dit le chanoine Theys, les troupes espagnoles qui avaient combattu le 29 août et remit des présents aux principaux officiers.

Dans son intéressant ouvrage sur Fleurus, le chanoine Theys reproduit l’inscription qui fut gravée sur un monument funéraire placé à gauche de l’autel de l’église d’Howardries. Consacré à la mémoire du capitaine de cuirassiers du Chastel, cette inscription est mi‑partie française, mi‑partie latine. Nous la reproduisons ci‑dessous entièrement en français : « Gist en la chapelle Notre‑Dame noble et valeureux cher messire Françhois du Chastel, vicomte dAime­rin, capitaine de cent cuirassiers por le service de Sa Majesté lequel ayant esté toute la guerre de Bofie (i) en la dite charge et retourna par decha mourut en la bataille contre Maesfelt proche Flerue (2) 29 aost 1622. Victorieux j’ai vu les vaillants Autrichiens, les féroces Hongrois, les Bohémiens rebelles, les Moraves, les Silésiens ; je suis revenu sur le sol natal belge où j’ai trouvé la mort en combattant dans le champ de Fleurus. Apprenez à être prêt à mourir ».

Au cours de la bataille de Fleurus, Christian von Halberstadt avait reçu un coup de feu au bras gau­che. Ayant négligemment soigné sa blessure, cette plaie s’envenima et la gangrène finit par s’y mettre. L’amputation apparut dès lors indispensable. C’est dans la campagne du pays de Liège et au son des trompettes et des tambours que l’évêque voulut subir la douloureuse opération qu’il supporta d’ailleurs avec un extraordinaire courage. Cette mu­tilation ne devait d’ailleurs avoir aucune influence sur « l’a fougue de ses passions ». A la Haye, dit le comte de Villermont, il se fit faire par un artiste particulièrement adroit un bras en argent (en fer, selon d’autres historiens) qui, grâce à un ingénieux mécanisme remplaça, du moins dans une certaine mesure, le bras disparu.

Pour en revenir aux étendards tombés aux mains des Espagnols à Fleurus, précisons que don Gonza­lès de Cordova les avaient tous envoyés à Bruxelles. Sur celui d’Halberstadt figurait un bras sortant du ciel avec, nous l’avons dit, la devise « Pour la liberté ». « On considéra, écrit le comte de Viller­mont, comme un châtiment providentiel que le prin­ce incendiaire eut été justement frappé au bras ». Un autre étendard, ajoute le même auteur, fut présenté à l’Infante Isabelle par le capitaine qui l’avait pris après avoir occis le Luthérien qui le portait.

En Hollande, où il était arrivé avec les rescapés de Fleurus, Mansfeldt reçut fort bon accueil du prince d’Orange. Il entra ensuite en Wesphalie où ses sou­dards, selon leur triste habitude, pillèrent plusieurs villes. Il se retrancha alors en Frise orientale où Tilly n’osa d’ailleursos’e risquer à l’attaquer. Après avoir dévasté la contrée, il licencia ses troupes et, avec le produit de sqs rapines, s’en fut à La Haye, puis à Paris et à Londres, mener joyeuse vie. En 1625, il rentra en Allemagne à la tête de 12.000 hommes parmi lesquels figuraient 3.000 Ecossais, un corps de Danois, le reste étant composé de dangereux aventuriers. Vaincu en 1626 par le célèbre Wallenstein, général des Impériaux, il battit en retraite dans la marche de Brandebourg où il leva une nouvelle armée à laquelle se joignirent 5.000 Danois. Dans l’intention de se joindre à Bethlen‑Gabor, prince de Transylvanie, il envahit la Silésie et la Moravie et gagna lablonka où le due de Saxe‑Weimar fit sa jonc­tion avec lui. Ayant appris que Bethlen‑Gabor avait fait la paix avec l’Empereur, il remit le commande­ment de ses troupes à Saxe‑Weimar. En quête de nouvelles aventures, il voulut se rendre à Venise mais tomba malade à Bude. Il n’en poursuivit pas moins sa route. Cependant, arrivé à Branovitz, petite ville de Bosnie, il sentit que ses jours étaient comp­tés. Sa fin fut digne de l’Antique. Voyant la mort approcher à grands pas, il se coiffa de son casque, mit sa cuirasse, ceignit son épée et c’est debout, entre deux domestiques qui le soutenaient, que le terrible Mansfeldt expira.

Dès qu’il fut guéri, Christian von Halberstadt appa­rut devant Berg‑op‑Zoom dont il fit lever le siège. Rentré peu après en Allemagne, dit la Biographie Universelle ancienne et moderne, il aurait pu se ré­concilier avec l’Empereur mais celui‑ci ne voulant pas comprendre dans cette réconciliation l’électeur palatin et ses autres alliés, la paix n’eut pas lieu. La guerre ayant repris, Christian von Halberstadt se fit battre par Tilly. Contraint de fuir, il alla chercher des secours en Hollande et en Angleterre. A son retour, dit la Biographie Michaud, il obtint quelques succès avec Mansfeldt. Notre redoutable évêque luthérien trépassa à Wolfenbuttel le 9 juin 1626. Le bruit courut qu’il avait été empoisonné.

La journée de Fleurus, comme certains historiens le disent, fut‑elle indécise où vit‑elle, ainsi que d’autres le prétendent, le triomphe de Christian von Halber­stadt et d’Ernest de Mansfeldt ? Assurément non. Grâce aux redoutables tercios de leur infanterie, Fleurus fut une incontestable victoire pour les Espagnols.

Mansfeldt serait, paraît‑il, le premier qui ait employé des dragons à la guerre. On raconte aussi, dit la Biographie Michaud, qu’un de ses officiers nommé Cazel communiquant ses plans à l’ennemi, Mans­feldt lui remit une somme d’argent ainsi qu’une lettre pour le comte de Bucquoi. Cette missive contenait ces quelques mots : « Cazel étant votre affectionné serviteur et non le mien, je vous l’envoie afin que vousprofitiez de ses services ».
On n’est pas plus obligeant. Bizarre Mansfeldt.

Nous terminerons par l’évocation d’un épisode qui eut lieu lors de l’entrée des Luthériens en Hainaut et que mentionne le comte de Villermont. Le même auteur dit d’ailleurs ne pouvoir affirmer l’authenticité de cet épisode bien « qu’il soit extrait d’archives respectables », celles du château de Chimay. Passablement teintée de chauvinisme, l’anecdote lui paraît en effet faire un peu trop d’honneur au courage des femmes de Chimay. Quoi qu’il en soit, voici les faits. Le 26 août 1622, Mansfeldt, qui pour la mettre au pillage, espère s’emparer de Chimay médiocrement défendue, envoie vers cette petite ville un détachement de ses troupes de féroces aventuriers avides de vols et de carnage. Les voyant approcher, « quelques bourgeois pusillanimes, écrit le comte de Villermont, prétendirent qu’il serait inutile, imprudent même de se défendre », mais les Chimaciennes ne l’entendent pas de cette oreille. Elles courent aux ramparts et occupent tous les points stratégiques de la ville. Cette attitude en impose aux Luthériens qui renoncent à se porter à l’assaut. Cependant, au moment où ils vont se retirer, l’un d’entre eux « découvrit, écrit encore le comte de Villermont, l’ouverture d’un égoût qui débouchait non loin des murailles » et dont l’autre orifice s’ouvrait près de celles‑ci, dans la ville. Il était d’ailleurs possible à un homme de s’introduire dans cet égoût qui « servait d’exutoire au trop plein d’une fontaine formant lavoir ». A la queue leu leu, des soudards luthériens s’engagent dans l’égoût sans éveiller l’attention des sentinelles postées sur les murailles de Chimay. A peine le Luthérien qui rampe le premier commence‑t‑il à passer la tête hors de l’égoût que des Chimaciennes qui lavent leur linge se précipitent sur lui avec des armes improvisées, l’envoient de vie à trépas et font aussitôt disparaître son cadavre. Plusieurs Luthériens subissent d’ailleurs le même sort. Voyant l’eau qui stagne dans l’égoût teintée du sang de leurs compagnons, les derniers Luthériens rebroussent précipitamment chemin et sortent tout aussi vite du conduit, honteux comme des renards que des poules auraient pris.

Hainaut Tourisme, novembre 1983, Jean Godet




1622, un épisode fleurusien de la guerre de trente ans.

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1622, un épisode fleurusien de la guerre
de trente ans.

Si 1622 est l’année de la bataille de Fleurus, 1621 est celle du tournant qui amènera à cet événement. Philippe III et Albert de Habsbourg s’éteignent et Philippe IV reprend le contrôle des Pays-Bas bien décidé à y relancer la guerre contre les Provinces-Unies.
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jacques callot

Début 1622, Philippe IV a lancé Ambrosio Spinola à l’assaut de Bergen-op-Zoom. Dès qu’ils en sont informés, Christian de Brunswick et Ernst von Mansfeld prennent la route. Où pourraient-ils aller d’ailleurs ? Licencié par Frédéric V, poursuivis par les armées unies du Saint-Empire et espagnoles, la meilleure chance des deux hommes et de leurs troupes est de rejoindre Bergen-op-Zoom, d’en lever le siège et d’entrer ainsi « en amis » dans les provinces hollandaises.


mansfeld

Une pensée doit également assiéger Ernst de Mansfeld, fils illégitime du Gouverneur de Luxembourg et de Bruxelles, il a été dépouillé de son héritage au profit d’Isabelle de Habsbourg. Pénétrer dans les Provinces-Unies en ravageant le « Royaume de Basse-Belgie » ne doit pas lui être particulièrement désagréable. Qui plus est, ce pays est riche. Pour ces hommes qui ne se battent pas par idéal, et doivent leur survie ou leur richesse à la guerre, au pillage et au meurtre; c’est une proie tentante.

La menace représentée par ces troupes est donc importante. En août 1622, le duc de Nevers, gouverneur de Champagne pour le compte du Roi de France Louis XIII, vers laquelle elles font mine de s’avancer en passant par Verdun, s’entend avec les Espagnols pour leur barrer la route. Le but de la Ligue catholique est, par un mouvement rapide, de barrer le passage vers la Hollande.
Habiles tacticiens, Christian et Mansfeldt ont deviné la ruse et entraînent, à marche forcée, leurs troupes vers les Pays Bas espagnols.

Toutefois, quand s’ouvre ce chapitre, la confiance est du côté espagnol. Les troupes de Mansfeldt et d’Halberstadt démoralisées par la série de défaites subies, semblent sur le point de faire face à l’infanterie espagnole que l’on dit invincible. On se flatte donc du côté catholique de pouvoir bientôt les détruire. Mais les mercenaires ne manquent pas de ressources, les cavaliers ennemis prennent les fantassins en croupe et franchissent la Meuse à Mézières et la Sambre à Gué dans la région de Maubeuge. Après avoir fait mine de foncer directement vers l’ouest de Bruxelles en direction de la côte, la troupe de mercenaires infléchi sa route vers le Nord. Le détour, est important, donc une bonne raison doit les avoir obligé à suivre cette route.

En fait, le représentant du Roi de France en Champagne, en plus de ses accords avec les espagnols s’est entendu avec Mansfeld et Brunswick pour qu’ils quittent les terres de France sous 48 heures en l’échange de 500 chevaux chacun. Mais comment dès lors rejoindre les Provinces-Unies ?


Brunswick


L’infante Isabelle d’Espagne, informée de cette «visite impromptue» a réagi en ordonnant au grand bailli du Hainaut Philippe-Emanuel de Croy, comte de Solre, de prendre les mesures nécessaires pour empêcher l’entrée de Mansfeld dans le comté. Il a été décidé d’armer les paysans et de surveiller «avenues et passages ». On met également les places fortes de Mariembourg, Philippeville et Charlemont (place-forte construite en 1555 situé sur les hauteurs de Givet) en alerte et certaines populations directement menacées sont invitées à évacuer.
Le 24 août 1622, la troupe de mercenaires incendie le bourg de Mezières et le soir venu campe entre Thin-le-Moutier et L’echelle; villages situés à l’ouest de Charleville-Mezières. La frontière « belge » de ce côté est garnie de retranchements et de troupes et ne pourra être franchie sans problème. Qui plus est, en cas d’alerte, les digues retenant les eaux des viviers, nombreux dans la région, peuvent être brisées à tout moment pour engloutir les terres et bloquer les troupes.

Incapable d’aborder l’entre Sambre et Meuse bien défendue, que d’ailleurs précède l’impénétrable forêt de la Thiérache, il ne reste à la troupe qu’une solution : tourner ces défenses par Binche pour pénétrer dans les plaines du Brabant en passant par Aubenton, Hirson, La Capelle, Etroeungt, Avesnes.

C’est en pillant et incendiant au passage quelques cités que le plan se réalise.

Le 27 août 1622, ayant franchi la Sambre à côté de Maubeuge, l’évêque luthérien et Mansfeldt entrent dans ce qui deviendra un jour la Belgique, et font arrêt à proximité de l’abbaye de Bonne-Espérance d’Estinnes.

Le 28 matin, ils passent à portée d’arquebuse de Binche d’où, du haut des remparts, on leur tire des coups de feu pour les tenir à distance. Ils poursuivent leur marche en empruntant la chaussée Brunehaut. Désormais, par la Campine, Bergen op Zoom n’est plus qu’à quelques jours de marche. Arrivés dans la plaine de Fleurus, ils camperont en avant de Wagnelée vers les 6 heures le soir du 28. Soit une étape de près de 50 kilomètres.

Informé de la marche de l’ennemi, don Gonzalès de Cordova, dont les troupes occupaient le Luxembourg, n’a pas fait moins bien en se hâtant de prendre le chemin des Pays Bas espagnols.

Parti de Luxembourg où il stationnait, il a franchi la Meuse à Givet et le 27 au soir, avec sa cavalerie, et atteint Pont de Loup. Ignorant où se trouve son ennemi, il envoie en reconnaissance l’un de ses officiers, Philippe de Sylva, dans la direction de Binche avec ordre d’obliger les paysans à prendre les armes et à harceler l’ennemi. Mais c’est déjà trop tard. Au moment où Gonzalès de Cordova est rejoint par son infanterie, il apprend que les troupes ennemies, ayant dépassé Binche, marchent déjà sur Fleurus. Il part donc immédiatement pour leur couper le passage.

Laissant à deux de ses officiers, Diego de Ibarra et Guillaume Verdugo, la mission de pousser la progression de l’infanterie, don Gonzalès, avec toute sa cavalerie, devance son ennemi et prend position au nord de Fleurus. Ici, les versions entre les historiens s’étant intéressés à la bataille de Fleurus divergent. Pour certains, c’est le dos appuyé à Fleurus qu’il se positionne, pour d’autres, c’est dos à Saint-Amand, et pour les derniers c’est le dos appuyé à la chaussée romaine (chaussée Brunehaut) qu’il attend le gros de sa troupe.


Toutes ces versions portent en elles une part de vérité, et la réalité est plus que probablement un mélange de ces dispositions. Toutefois, comme en attestent des cartes et documents d’époque ainsi que des relevés topographiques plus récents. La position la plus probable se situe à la gauche de l’ancien chemin de Fleurus à Nivelles, avant la croissement avec la chaussée Brunehaut. Il existe à cet endroit deux élévations de terrain, distantes de quelques centaines de mètres, propice à l’installation de l’artillerie et de troupes.

Vers les 5 h 30 du soir ce 28 août, enfin rejoint par son infanterie son dispositif est enfin complet malgré une pluie d’orage torrentielle. Son armée est divisée en 4 corps de troupes. Les troupes sont disparates mais, comme le montrera la suite, bien formées et disciplinées. On y trouve des Espagnols, des Bourguignons, des Allemands, des Italiens et des Wallons. Placée à l’aile droite, la cavalerie espagnole assure la jonction entre les troupes wallonnes retranchées dans les fermes de Chassart et les carrés des quatre corps de troupes. Tenant la position à droite, les italiens du marquis de Campolataro. A sa gauche, le régiment d’Isenbourg, la compagnie d’Emden et 4 compagnies franches, des troupes mercenaires, dont on s’attend à ce qu’il reçoive l’essentiel du choc. Viennent ensuite les Allemands du comte Otto Henri Frugger dirigé par le lieutenant colonel Camargo. Tenant l’aile gauche, le premier corps sous les ordres de Diégo d’Ibarra et de Guillaume de Verdugo est composé d’Espagnols, de Bourguignons et de Wallons.


A peine l’armée de Cordova a-t-elle terminé ses préparatifs que l’ennemi apparaît dans le lointain venant de la direction de Fleurus, il est 6 h. Surpris d’apercevoir les troupes de don Gonzalès, Halberstadt et Mansfeldt font faire halte à leurs bandes. Un instant ils feignent de vouloir forcer le passage par la droite des Espagnols mais renoncent rapidement.

L’obscurité venue, pour tromper l’adversaire sur leurs forces réelles, Mansfeldt et Halberstadt font allumer de grands feux de tous côtés et battre le tambour tandis que de petits groupes pénètrent dans Fleurus pour la piller et l’incendier.

Les forces respectives qui le lendemain, 29 août, vont se heurter à Fleurus, comprennent du côté des Luthériens 48 gros(ses ?) (48 X 148) de cavalerie, soit 7.000 cavaliers, et 7.000 à 8.000 hommes de pied. Du côté des Espagnols de la ligue catholique on aligne 8.000 fantassins et 2.000 cavaliers. La disproportion des forces peut sembler importante mais elle est le reflet de la spécificité de chacun des deux camps.

Dès l’aube du lundi 29 août, la bataille commence. Reprenant la tactique de la veille, un gros de cavaliers tente de les déborder sur la gauche espagnole. Don Gonzalès fait renforcer hâtivement cette aile et disperse l’attaque de quelques salves de canons. La réponse est immédiate. Supérieure en nombre, la cavalerie de l’évêque luthérien charge furieusement les cavaliers espagnols qui se débandent. Toutefois, au lieu de poursuivre les fuyards, les troupes luthériennes se jettent sur les bagages qu’elles pillent. Elles s’emparent du carrosse du comte d’Isenbourg, du trésor de guerre de don Gonzalès et de ses papiers.

A ce moment apparaît le colonel Gaucher «qui bien que fort incommodé d’un bras, était arrivé la veille à francs étriers, du fond du Luxembourg ». Gaucher, qui, tient absolument à participer à la « fête », rassemble la cavalerie espagnole, contre-attaque sur les cavaliers d’Halberstadt et les repousse «l’épée dans les reins».

Incapables de détruire la faible cavalerie espagnole, les troupes luthériennes sont obligées de s’attaquer à la redoutable infanterie espagnole. Six charges suivent. L’une après l’autre, elles se brisent les piques des fantassins de la Ligue catholique.

A mesure que la journée s’avance, la bataille reste indécise. Mansfeldt voyant ses troupes fondre sans résultat décide de prendre lui-même la direction de l’attaque du centre espagnol où les tercios, érodés par les charges précédentes, cèdent lentement. Une terrible mêlée s’ensuit. Si désormais le surnombre des troupes luthériennes devient un paramètre important, la victoire à cette seconde n’est ni d’un côté ni de l’autre et seule la valeur des hommes en présence fera la différence. En effet, il reste un espoir à Cordava. D’un instant à l’autre une troupe de quelques milliers de paysans, réquisitionnés par le comte de Solre, grand bailli de Hainaut, peut arriver sur le champ de bataille faisant basculer la victoire.

Vers les 11h du matin, la lutte s’éternisant, Halberstadt et Mansfeldt sont obligés de faire un choix. Poursuivre la lutte jusqu’à la destruction de l’ennemi, au risque d’être eux-mêmes réduits à néant ou fuir. Rassemblant toutes leurs forces, dans un sursaut d’énergie, ils parviennent à contourner l’extrême gauche espagnole et fuient. Les troupes espagnoles, épuisées par la lutte, ne peuvent ou ne veulent les arrêter.

Cordova l’emporte puisqu’il reste maître du champ de bataille mais les troupes de Mansfeldt et d’Halberstadt n’ont pas été écrasées. Les luthériens ont certes perdu 18 étendards et 3000 hommes, soit 1/5e de son effectif, mais la troupe n’a désormais plus rien face à elle qui puisse s’opposer à son passage. De leurs côtés les espagnols ont perdu 1/10 de leurs combattants au nombre desquels 300 morts et 900 blessés.

Quant aux paysans attendus, ils ne sont jamais arrivés sur le champ de bataille ; mal informé, le comte de Solre les a dirigés sur Mons.

Fleurus, où quelques mousquetaires s’étaient retranchés doit être «nettoyée». La ville en sort presque entièrement incendiée. Mais, les multiples souterrains de la ville ont permis aux habitants de la cité de survivre.


Callot

Son infanterie étant trop fatiguée par la marche forcée et le combat, don Gonzalès de Cordova renonce à poursuivre l’ennemi. Mais la cavalerie s’élance.

A la tombée de la nuit, les Espagnols arrivent devant Gembloux où ils font halte. Le lendemain, le colonel Gaucher, à la tête d’une troupe de cuirassiers rejoint l’infanterie ennemie restée en arrière et la taille en pièces.

Au total, durant la fuite, Mansfeldt et Halberstadt perdront 8000 hommes supplémentaires, leurs bagages et leur artillerie. Cependant les quelques troupes leur restant suffiront à lever le siège de Bergen op zoom qui durait depuis déjà 3 ans.

Après la bataille

Informées de la bataille de Fleurus, l’Infante ordonna que des soins soient portés aux blessés sans tenir compte du parti auquel ils appartenaient. Elle visita même certains d’entre eux et assura leur subsistance.

Que devint Christian von Halberstadt ?

Au cours de la bataille de Fleurus, Christian von Halberstadt a été blessé par une balle au bras gauche. Mal soigné, la gangrène a gagné le membre.

C’est durant la fuite, dans la campagne du pays de Liège, au son des trompettes et des tambours, que l’évêque choisit de subir l’opération qu’il supporta d’ailleurs nous dit sa légende avec un extraordinaire courage. Cette mutilation n’eut d’ailleurs avoir aucune influence sur « la fougue de ses passions ». Réfugié à la Haye, il s’y fit fabriqué par un artiste adroit un bras en argent (en fer, selon d’autres historiens) qui, grâce à un ingénieux mécanisme remplaça, du moins dans une certaine mesure, le bras disparu.

Bizarrerie de l’histoire, parmi les étendards tombés aux mains des Espagnols se trouvait celui d’Halberstadt sur lequel figurait un bras sortant du ciel avec la devise «pour la Liberté». «On considéra, écrit le comte de Villermont, comme un châtiment providentiel que le prince incendiaire eut été justement frappé au bras». Il continua cependant à se battre pour les protestants et mourut de maladie à Wolfenbüttel le 16 juin 1626.

Que devint Ernest de Mansfeldt ?

En Hollande, où il était arrivé avec les rescapés de Fleurus, Mansfeldt reçut un accueil digne d’un ami. Rapidement, il reprit le combat et entra en Wesphalie où ses soudards, selon leur habitude, pillèrent plusieurs villes.

Vers 1624 il fit 3 voyages à Londres où il fut une nouvelle fois acclamé comme un héros par la populace, et au moins un à Paris. A l’instigation du roi d’Angleterre Jacques Ier désireux de reconquérir le Palatinat, sa fille Elisabeth Stuart étant la femme de Frédéric V, en janvier 1626, Mansfeld repassa de Douvres aux Pays-Bas. Après une nouvelle défaite le 25 avril 1626, au pont de Dessau, il parvient très rapidement à lever une nouvelle armée. Suite à un changement de politique, Mansfeld est contraint de la licencier avant même le premier combat. Il part alors vers Venise pour y lever de nouvelles troupes mais tombe gravement malade en route. Il meurt réconcilié avec l’Église Catholique, le 29 novembre1629, et est inhumé à Spalato.




Le monument aux trois victoires françaises

Placé au pied du moulin Naveau de Fleurus, le monument « Aux victoires françaises » a fait coulé pas mal d’encre depuis son installation en 1936, et même bien avant.

Non seulement, personne ne semblait en vouloir, mais l’affirmation que la troisième victoire, celle de Napoléon, est une victoire fleurusienne en a énervé plus d’un.

Lorsque ce projet fut lancé au début des années 1930, personne ne voulait de cet emcombrant témoignage du lien indéfectible unissant la Belgique à la France comme le définissait son promoteur.

Sa naissance fut un long combat mené durant deux ans, par le thudinien expatrié à Paris, Maurice des Ombiaux.

Ce monument, aujourd’hui un des plus célèbres de l’entité de Fleurus, a désormais trouvé sa place sur notre territoire. Et les questions qu’il a fait naître s’expliquent désormais sans qu’il soit besoin de recourir à des arguments reposant souvent bien plus sur les sentiments qu’à l’analyse logique.

Pour en savoir plus sur cette étrange histoire, voici quelques articles anciens :

« Le monument aux trois victoires françaises de Fleurus » par Charles Mathieu – seconde partie de l’article dédié par l’auteur à « Fleurus, champ de bataille d’une Europe révolue » paru dans le bulletin de la Société d’Histoire, Arts et Folklore des communes de Fleurus en 1986

« Maurice des Ombiaux promoteur du monument au 3 victoires francaises de Fleurus »  de Michel Siraut, paru dans la brochure « Hainaut Tourisme » en 1986

« Les Victoires françaises de Fleurus », le texte édité par le comité franco-belge du « Monument aux 3 victoires françaises de Fleurus ».

 




1er juillet 1690, Louis XIV au faîte de sa puissance.

La guerre de la ligue d’Augsbourg commença en 1689 .
Mais ses sources sont plus anciennes.

Elles remontent à la paix conclue à Nimègue en 1678 qui a reconnu les conquêtes antérieures de la France (la Franche-Comté, l’Alsace, le Roussillon, et le Nord de la France), ainsi qu’à la révocation de l’Edit de Nantes en 1685.

Grâce à ces circonstances favorables, l’adversaire le plus acharné du “Roi Soleil”, Guillaume III, roi d’Angleterre et d’Ecosse, n’a eu aucune peine à nouer la “ Ligue d’Augsbourg ”, constituée de l’Angleterre, la Hollande, l’Empire Autrichien et la plupart des princes Allemands dont celui de la future Prusse.

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Portrait Of William III

Pour faire face à cette menace, Louis XIV, alors à l’apogée de sa puissance, ne met pas moins de 350.000 combattants sur pied (la France est alors le pays le plus peuplé d’Europe), et la Ligue met en ligne des armées aussi nombreuses.

L’objectif de la coalition est d’envahir la France, prendre Paris et faire signer une paix humiliante au Roy de France.

La menace est si sérieuse que Louis doit renoncer à ses projets de nouvelles conquêtes et adopter une politique militaire défensive. Pour faire aboutir ses plans, la coalisation compte tirer parti ce qu’elle imagine être une faiblesse de la France de cette époque, les deux grand hommes de guerres français du 17eme siècle, Condé et Turenne, sont morts !

Louis XIV

Cependant Louis XIV peut encore compter sur un condisciple de Condé, le prince de Bouteville-Montmenrency, duc de Luxembourg et pair de France. Luxembourg est un excellent tacticien qui a déjà réussi à s’illustrer brillamment pendant les campagnes de Flandres en 1677-1678, mais lorsque débute la guerre (1689), cela fait près de 10 ans qu’il est tombé en disgrâce suite à son éventuelle participation à l’affaire des poisons

Toutefois, Louis XIV, et son Premier-Ministre Louvois, estiment que Luxembourg est le seul à pouvoir faire face à la coalition et lui donnent le commandement de l’armée de Flandre.

L’intention première de Luxembourg est de s’avancer vers Anvers pour menacer, et pourquoi pas prendre, le plus grand port d’Europe.

Mais apprenant que le prince de Waldeck se rapproche de la Sambre pour effectuer sa jonction avec l’électeur de Brandebourg, qui arrive de la Moselle, il se rabat rapidement vers l’Est pour attaquer les Anglo-Hollandais avant leur jonction avec les Prussiens. Filant le long de la rive droite de la Sambre, il passe la rivière entre Ham-sur-Sambre et le château de Froidmont. Sa marche est si rapide que l’ennemi n’en a connaissance que lorsque l’armée française est presque à portée de canon.

bataille 1690_HI

Waldeck, qui commande les troupes de la Ligue, se hâte de ranger ses 40.000 hommes en arrière de Fleurus, entre Heppignies et Wagnelée. Luxembourg, disposant lui aussi 40.000 hommes, décide de l’attaquer sans attendre. 

Pendant que de Waldeck, persuadé qu’il va être attaqué de face, donne toute son attention à cette partie du champ de bataille, Luxembourg tourne l’aile gauche du dispositif coalisé, franchit le ruisseau de Ligny sur deux ponts de bateaux, traverse le marais de Wagnelée.

A midi moins quart, les combats commencent. L’infanterie de la gauche française entre dans les haies de Wangenies et, après un combat acharné, finit par s’y établir. Au centre, les bataillons français avancent sur Saint-Amand et gagnent du terrain mais le mouvement ne peut se poursuivre.

Georg Friedrich

Suite à une série de coups chanceux, la plupart des officiers supérieurs français commandant le centre et la gauche ont été tués ou blessés.

Sans commandement, les troupes hésitent puis reculent.

La cavalerie française repasse le ruisseau qui traverse Wangenies (le Berlaimont) et rentre dans Fleurus; l’infanterie suit le mouvement.

Saint-Amand doit également être abandonnée, on y laisse seulement le régiment de Champagne, qui s’y est barricadé.

Alors que Waldeck se félicite encore de ce “coup de chance”, les choses se révèlent plus difficile en arrière de sa gauche; et il y voit sa cavalerie dispersée et son infanterie s’éparpiller vers Wagnelée.

Waldeck réagit. Il ordonne à ses troupes de s’établir en barrage entre Wagnelée et la cense de Chassart. En même temps, il donne ordre à sa cavalerie de la droite, de secourir l’aile gauche où le désordre grandit.

Mais les troupes françaises de Saint-Amand reprises en main par de nouveaux officiers ont déjà repris leur marche en avant. Quittant Fleurus, la cavalerie et l’infanterie chargent de nouveau l’aile droite et le centre des alliés.

Cette action brise définitivement la ligne de défense de l’aile droite de Waldeck qui est obligé d’engager ses réserves. Le calcul est payant. Les troupes dispersées se rallient aux carrés et se retirent en bon ordre du champ de bataille.

A cet instant, la victoire est entre les mains françaises mais Luxembourg, prudent, n’ose pas entreprendre une poursuite hasardeuse face à des troupes toujours redoutables.

Au cours de cette journée, Luxembourg a démontré ses immenses talents de tacticien. Il saura utiliser cette victoire pour reprendre l’initiative dans la guerre en cours. A deux nouvelles reprises à Steinkerque en 1692 et Neerwinden en 1693, il vaincra à nouveau les armées coalisées commandées cette fois par Guillaume III d’Orange, Roi d’Angleterre.

Lors de ses victoires, le maréchal Luxembourg va capturer de nombreux drapeaux et étendards ennemis. Ils serviront à décorer l‘église de Notre Dame à Paris. C’est pourquoi les Parisiens lui donneront le surnom de : “Tapissier de Notre-Dame”.

Si les victoires du maréchal de Luxembourg auront permis la conquête de la Belgique, le Roi de France, désireux d’éviter un nouveau conflit, rendra ses conquêtes rétablissant au passage le prestige écorné de la France.




Fleurus, champ de bataille d’une Europe révolue

L’histoire telle qu’elle est enseignée aux enfants dans nos écoles semble être une chose inaltérable. Un instrument de mesure précis et objectif du passé. La réalité est différente. L’histoire, comme toute chose humaine, est fluctuante. Elle dépend largement de l’interprétation que l’on peut en faire en fonction de facteurs sociaux, économiques et les « objectifs » de l’auteur.

Pour rendre le tableau plus complexe encore, il est nécessaire d’être conscient que le récit historique est une discipline d’autant plus complexe qu’elle dépend très largement du talent de celui duquel nous tenons le récit. Ceci explique la raison pour laquelle un seul événement peut prendre des apparences parfois si profondément différentes. C’est le problème auquel nous avons été confrontés lors de la rédaction de ces pages. Dès lors, notre objectif, autant que celui-ci soit accessible, a été d’offrir à nos lecteurs une synthèse de certains textes à notre disposition. Ce travail tenant compte également d’un élément parfois oublié par les historiens, la « réalité du terrain ». Afin de permettre à nos visiteurs de mieux comprendre notre point de vue en la matière, notre choix a été de diviser les articles de cette section en différentes parties. La première, intitulée « Les victoires françaises de Fleurus » reprend le texte intégral de la brochure, parue entre 1934 et 1936, éditée par le comité franco-belge du mémorial de Fleurus sur les batailles de 1690, 1794 et 1815. Quant au trois autres sections, elles synthétisent différents textes concernant les batailles de 1622, 1690 et 1794.

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Fleurus, champ de batailles, pourquoi ?

« A douze kilomètres au Nord-Est de Charleroi et à une lieue de la rive gauche de la Sambre et de la chaussée romaine, au milieu d’une plaine fertile, s’élève la petite ville de Fleurus, qui a eu la fortune médiocrement enviable, mais unique dans l’histoire, de donner son nom à quatre batailles et de surpasser ainsi Mantinée et Benévent.

Quant aux trois victoires françaises de Fleurus, ce sont celles:

  • 1° du maréchal de Luxembourg sur une armée hispano-allemande, aux ordres de Waldeck. 
  • 2° du général Jourdan sur les Alliés.
  • 3° de Napoléon sur les Prussiens.

Si Fleurus n’a pas vu le dénouement de ces batailles mémorables, il est bien néanmoins le point de contact, le “ lieu commun ” des positions occupées par les armées en présence dans ces trois grandes actions, dont nous allons retracer les péripéties.

Mais auparavant, qu’il nous soit permis de dire quelques mots sur cette petite ville. D’après d’anciens écrivains, Fleurus tire son nom de la fertilité de son sol et de ses riantes campagnes (Floridum rus, champs fleuris). L’existence de Fleurus à l’époque gallo-romaine paraît probable. Les antiquités romaines qu’on y a découvertes (bagues à chaton unique, pièces de monnaies, bronze de plusieurs empereurs) et l’étymologie de son nom permettent cette supposition.

L’importance que prit la localité à l’époque franque se déduit du fait qu’elle fut choisie comme chef-lieu d’un vaste doyenné, probablement dès l’organisation de la circonscription de l’ancien diocèse de Tongres ou de Liège. Ajoutons que la première mention historique de la ville n’est pas antérieure au Xème siècle. La chronique de l’abbaye de Waulsort rapporte que Gilbert, fondateur de ce monastère, mourut à Fleurus le 28 mars 977.

Dans le cours du Moyen-Age, Fleurus resta l’une des villes les plus riantes du pays, bien bâtie et ornée de belles places.

Malheureusement, au XVIe siècle, les guerres de religion, les passages fréquents de troupes portèrent le pillage et la dévastation dans nos régions et Fleurus ne fut pas épargné. En 1591, une bande d’Espagnols mercenaires qui étaient campés près de la ville et qui ne ménageaient pas le pays (suivant l’habitude constante des troupes de cette espèce, surtout quand elles étaient Espagnoles ou Allemandes) se mutinèrent à Fleurus et imposèrent des contributions à toutes les communes des environs, les menaçant de pillage, si elles ne s’exécutaient pas. Les Fleurusiens souffrirent longtemps sous le poids de ces exactions et durent s’imposer des sacrifices considérables. »

Le titre de cet article a été emprunté à l’article de Charle Mathieu « Fleurus, champs de bataille d’une Europe révolue » dont le passage ci-dessus a été extrait.